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Spoliation organisée des sociétaires propriétaires de leur banque...

Édition : Le monde de l'Economie Sociale et Solidaire

Crédit Agricole : des pubs qui posent question

02 mars 2014 | Par Patrick Le Cellier

Dès qu'ils franchissent la porte de leur banque coopérative, les sociétaires sont « chez eux ». D'où la formule à l'entrée de la maison natale de Alphonse Desjardins, à Levy (Québec) : « Bienvenue chez vous ! ».

Alternativement prêteurs et emprunteurs, les sociétaires se prêtent de l'argent entre eux pour échapper à la voracité des usuriers et des banquiers. C'est le principe même. Comme l'a très bien rappelé, en 1994, Jean-Claude Pichon (alors directeur de la FNCA) dans son remarquable guide de l'administrateur (guide en six fascicules, rassemblés dans un luxueux coffret, édité par la fédération à l'occasion du centenaire... et dont nous avions eu la primeur).
Comme l'éclaire toute l’œuvre de Frederic Guillaume Raiffeisen

Après l'avoir longtemps escamotée, les dirigeants-profiteurs du Crédit Agricole Mutuel mettent l'expression banque coopérative à toutes les sauces... mais ils ont perdu le sens des mots et des réalités. Plus la banque est signalée comme coopérative... moins elle l'est désormais !

Les excédents ne sont plus redistribués mais gaspillés, détournés (il fait chaud au cœur, après chaque assemblée générale, de voir d'immenses banderoles barrer les façades des caisses locales Desjardins, au Quebec « Votre caisse a redistribué x $ cette année, au titre des excédents ») ; le barème égalitaire n'est plus respecté car on vend des « produits » ; les caisses de Crédit Agricole se font appeler caisse du Crédit Agricole ; les gérants pénalement responsables se cachent, les parts sociales sont vendues comme placement financier... Et la publicité devient folle.

Concernant la centralisation des activités, Michel Abhervé l'a signalé, le 26 février ; l'Association pour le renouveau du mutualisme (AREMUT) en fait état de son côté.

L'actuelle campagne télévisée va plus loin en trente secondes (lorsque les bornes sont franchies...) :

  • Je m'appelle Martine et j'habite à Nice.
  • Je m'appelle Maxime et je suis le roi du burger à Valbonne.
  • Bon, vous êtes tous les deux clients chez nous, au Crédit Agricole, mais vous avez également un autre un point commun, à votre avis, lequel ?
  • Je ne pense pas qu'on ait un point commun...
  • peut-être, j'sais pas...
  • ni l'âge, ni le style... rien du tout.
  • En fait, c'est grâce à votre épargne, Martine, et à celle des autres clients de la région que nous avons pu aider Max a lancer son entreprise
  • J'aurai droit à un hamburger gratuit ?
  • C'est ça, allez...
  • Allons bon...

Au Crédit Agricole, votre épargne aide les entreprises à se créer dans votre région.
Ça sert à ça une banque coopérative.

Prêter de l'argent pour financer l'économie locale, c'est ce que font toutes les banques du coin. Ce n'est pas à ce « détail » que l'on reconnaît une banque coopérative ! Sûrement pas ! Ignorance ? c'est grave... Cynisme ? ce serait terrible.

Cynisme, en tout cas, lorsque la coopérative – au mépris des valeurs - redirige ses sociétaires vers des financements de type usuraires mis en place par les filiales revolving... Sofinco pour le Crédit Agricole Mutuel ou Cofidis pour le Crédit Mutuel.

Cynisme, de toutes façons, de mettre sur le même plan les financements organisés dans la logique coopérative « d'échange »... et les assurances vendues par des filiales qui n'ont rien de mutualistes ni de coopératives et ne font que participer au détournement du bien commun.

Concernant le caractère fictif (« pour le principe ») des assemblées générales des caisses locales - devenues chambres d'enregistrement pour les activités marginales - il est passionnant de se référer aux actuels compte-rendus dans la presse :
- L'Isle-Jourdain. Une bonne année pour le Crédit Agricole (La Dépêche du Midi du 01/03)
- Fleurie (69) Le Crédit Agricole honore André Labruyère (Le Journal de Saône-et-Loire du 01/03)
- Crédit Agricole d'Uzès : une fructueuse rencontre égayée par la projection de quatre films (Le Midi Libre du 23/02)
- Thiers. La caisse locale du Crédit Agricole en assemblée, vendredi (La Montagne du 19/02)

Des mascarades... brièvement suivies de « quelques questions venant de l'assistance » (Dépêche du Midi du 28/02, AG de la Caisse de Bram).


Être une banque coopérative, c'est respecter la loi fondamentale du 10 septembre 1947... comme n'importe quelle autre coopérative. Et d'abord s'inscrire dans la philosophie résumée par l'article 1er de cette loi.

Les coopératives sont des sociétés dont les objets essentiels sont :

  1. De réduire, au bénéfice de leurs membres et par l’effort commun de ceux-ci, le prix de revient et, le cas échéant, le prix de vente de certains produits ou de certains services, en assurant les fonctions des entrepreneurs ou intermédiaires dont la rémunération grèverait ce prix de revient ;
  2. D’améliorer la qualité marchande des produits fournis à leurs membres ou de ceux produits par ces derniers et livrés aux consommateurs ;
  3. (Loi n° 9M2-643 du 13 juillet 1992, art. 1er.) « Et plus généralement de contribuer à la satisfaction des besoins et à la promotion des activités sociales et économiques de leurs membres ainsi qu’à leur formation.

Les coopératives exercent leur action dans toutes les branches de l’activité humaine.


On en est loin. Nous sommes en fait dans une logique « chèvre et chou », « carpe et lapin », « pâté d'alouette ».

L'intérêt d'une banque coopérative - pour les dirigeants qui se comportent en propriétaires de droit divin (cooptation) - c'est que la banque n'est pas opéable !
Ce dont le Crédit Mutuel fait actuellement une pub... et que Noëlle Uri, collaboratrice de Etienne Pflimlin, avait déjà avoué dans son bureau, il y a vingt ans).

Nul ne peut s'en emparer, la contrôler. Par contre, elle peut tout acheter : la multiplication des filiales est parfaitement contre nature. De la folie furieuse, le vertige de l'abîme.
En cas de faillite, les dirigeants partent avec les profits et les sociétaires gardent les pertes.

Tag(s) : #Article de presse
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